Mise à jour le 24/10/2025
Résultat, selon l’UFICT-CGT : 22 cadres en fuite, une administration en vrac, des services publics qui toussent. Ces méthodes staliniennes en veston, écho moqueur aux vieux démons du PCF, sabotent notre bien commun. Vigilance, citoyens : Noisy n’est pas un kolkhoze, c’est une commune libre !
Noisy-le-Sec : Quand les murs ont des oreilles et les téléphones une mémoire
Dans les communes urbaines de la petite couronne parisienne, les façades rénovées des bâtiments municipaux racontent une histoire en trompe-l’œil. Derrière ces pierres, dans ces couloirs où résonne l’écho des pas pressés, se joue un théâtre aussi vieux que le pouvoir lui-même : celui de la surveillance et du secret, de la parole surveillée et du silence stratégique. Oui, il se joue un théâtre ancestral : celui du pouvoir et de ses dérives.
Certains élus gouvernent avec sagesse, d’autres avec ambition, et puis il y a ceux qui, progressivement, transforment l’administration en un territoire de suspicion où chaque conversation devient une trace, chaque appel un indice, chaque loyauté une question ouverte.
L’Histoire nous enseigne que les techniques de contrôle n’ont pas de couleur politique. Elles s’adaptent, se déguisent, traversent les époques et les idéologies comme un virus silencieux. un virus silencieux, se déguisant en nécessité administrative, se parant des atours de l’efficacité moderne.
Et parfois, dans ces communes de Seine-Saint-Denis où le rouge des drapeaux côtoie celui des façades HLM, il arrive parfois que les héritiers des luttes pour la liberté deviennent, sans même s’en apercevoir, les gardiens d’un nouveau panoptique.
Le cri d’alarme
Le 3 octobre 2025, à 16h41 précisément, un courrier électronique a été adressé au cabinet du Maire de Noisy-le-Sec, à l’attention directe du premier magistrat. Pas une réclamation ordinaire sur la collecte des ordures, les horaires de crèche ou des demandes d’explications sur l’annulation des conseils de quartier. Non, ce message portait une interrogation grave : l’existence présumée d’un dispositif de surveillance systématique des communications téléphoniques des agents municipaux.
Plusieurs témoignages concordants avaient dessiné, au fil des semaines, le portrait inquiétant d’une administration où certaines lignes rouges auraient été franchies. Des appels enregistrés ou tracés sans information préalable. Des examens minutieux des appels sortants des lignes professionnels. Un cadre qui, lors du forum des associations du 6 septembre, aurait demandé explicitement l’identité des sources d’un lanceur d’alerte, laissant entendre qu’il allait « faire le nécessaire » pour les identifier.
Cette expression, « faire le nécessaire« , résonne comme ces formules qu’on préfère laisser dans le flou, ces menaces à peine voilées qui n’ont pas besoin d’être précisées pour être comprises. Elle évoque ces temps, pas si lointains, où l’on pistait les voix dissidentes, où l’on fichait les récalcitrants, où l’on transformait l’administration en instrument de contrôle plutôt qu’en outil de service.
Le courrier, étayé de références juridiques précises – RGPD, Code du travail, Convention Européenne des Droits de l’Homme – sollicitait des éclaircissements dans le respect du principe du contradictoire : l’existence ou non du dispositif de surveillance, les délibérations l’instituant, la déclaration CNIL, les modalités d’information des agents. Il demandait une réponse sous huit jours.
À ce jour, ce courrier est resté sans réponse.
Le silence, parfois, en dit plus long que les discours les plus élaborés. Ce n’est pas le silence de l’administration débordée qui tarde à traiter un dossier parmi d’autres. C’est le mutisme stratégique de ceux qui n’ont rien à dire qui puisse les innocenter, l’absence calculée de ceux qui espèrent que l’orage passera si l’on fait semblant de ne rien entendre. Car enfin, si ces accusations étaient infondées, si tout cela n’était qu’un malentendu ou une rumeur, ne serait-il pas dans l’intérêt de la municipalité de le dire clairement ?
L’hémorragie silencieuse
Cette interrogation sur une présumée surveillance s’inscrit dans un continuum plus vaste, documenté par un tract de l’UFICT-CGT qui résonne comme un SOS lancé depuis le pont d’un navire en perdition : « STOP À L’INGÉRENCE DU CABINET, AUX PRESSIONS ET AUX ATTAQUES CONTRE NOS DROITS ! »
Vingt-deux cadres ont quitté la collectivité. Vingt-deux départs qui ne sont pas le fruit du hasard, mais les symptômes visibles d’un mal plus profond. Ces ingénieurs, ces techniciens, ces responsables qui formaient l’épine dorsale de l’administration ont préféré partir plutôt que de subir ce qu’ils décrivent comme des pressions insidieuses, des fausses accusations, un harcèlement déguisé en exigence de gestion.
La chronique d’une décomposition annoncée
Le 24 octobre 2025, Jean-Paul Lefebvre, élu d’opposition, versait au dossier une chronologie édifiante de cette hémorragie administrative. Car ces vingt-deux départs ne seraient pas le fruit d’une coïncidence malheureuse, mais bien les jalons d’une désintégration méthodique.
L’année 2023 aurait donné le ton : le Directeur Général des Services et le Directeur de Cabinet remerciés « sans ménagement », selon les termes de l’élu. Puis, tel un château de cartes s’effondrant étage par étage, se seraient succédé les départs du Directeur de l’aménagement et de l’urbanisme, de la Directrice de l’éducation, de la Directrice des affaires scolaires, du Directeur de la jeunesse, de deux responsables des commerces, de la Directrice de la culture, du Directeur des sports, de la Directrice juridique.
Une litanie funèbre qui résonne comme l’inventaire d’une administration exsangue, privée de ses piliers dans les domaines les plus essentiels à la vie communale. « Aucune politique sérieuse ne peut être conçue et mise en œuvre dans de telles conditions », observerait l’élu avec cette sobriété qui, parfois, frappe plus fort que l’invective.
Mais l’affaire prendrait un tour encore plus troublant lorsque Jean-Paul Lefebvre révélerait l’existence de trente-cinq attachés contractuels, représentant un coût financier considérable de 2,5 millions d’euros au budget communal. À sa demande légitime de consulter les fiches de poste de ces agents – afin de comprendre la nature et la nécessité de ces recrutements –, le Maire aurait opposé un refus catégorique.
Ce déni de transparence soulèverait une interrogation aussi simple qu’embarrassante : ces postes servent-ils véritablement l’intérêt communal, ou participent-ils de ce « clientélisme » que l’élu d’opposition dénonce explicitement ?
À cinq mois seulement de la fin du mandat, cette opacité budgétaire ajouterait une dimension financière aux préoccupations déjà exprimées sur les méthodes de gestion.
Car entre les départs massifs de cadres qualifiés et le recrutement massif de contractuels dont les missions demeureraient opaques, se dessinerait le portrait d’une administration non pas réformée, mais démantelée puis reconstituée selon des logiques qui échapperaient au contrôle démocratique ordinaire.
Le tract syndical dénonce une confusion croissante des rôles : le Cabinet du Maire s’immiscerait dans les directions, utiliserait rumeurs et divisions pour opposer cadres et employés, syndiqués et non-syndiqués. Il piloterait directement des réunions avec les services, enverrait quotidiennement des injonctions, menacerait de sanctions quand un cadre apporterait des éléments d’infaisabilité.
Sa vision de l’administration tiendrait en une phrase rapportée : « Vous êtes priés de mettre en œuvre ce que le Cabinet vous demande. » Pourtant, il n’existe aucun lien hiérarchique entre le Cabinet et l’administration. Cette confusion transformerait les services publics en courroie de transmission politique, les agents en variables d’ajustement, les cadres en suspects permanents.
Derrière ces départs se cacheraient des projets qui s’enlisent, des services qui périclitent, une désorganisation croissante. Les crèches manqueraient de personnel qualifié, les chantiers traîneraient, les dossiers s’accumuleraient. Et pendant ce temps, ceux qui restent marcheraient sur des œufs, redoutant d’être les prochains sur la liste.
L’art de la disqualification
Il existe mille façons de briser quelqu’un sans lever la main. Des témoignages font état de tentatives de discréditation par l’usage d’étiquettes politiques infamantes. Certains agents se verraient traités de manière qui les isole, les marginalise, les discrédite. Lorsqu’on ferait part de ces accusations à la hiérarchie, une réponse tomberait, implacable dans sa logique : « Mais le Rassemblement National est un parti reconnu, il n’y a aucune injure… »
Cette rhétorique sophistiquée révèle un glissement sémantique inquiétant. Dans une commune où les valeurs de gauche sont revendiquées, traiter quelqu’un d’extrême droite ne serait pas une simple observation politique mais une arme de destruction professionnelle. Ce serait détourner le débat : au lieu de répondre sur le fond – les pratiques managériales, les atteintes aux droits syndicaux – on attaquerait la personne.
Ainsi fonctionnerait cette novlangue administrative : les mots perdraient leur sens pour devenir des instruments de pouvoir. Et quand ces méthodes seraient combinées à une surveillance présumée des communications, le dispositif de contrôle deviendrait total : on ne pourrait plus parler librement, échanger avec un syndicat, confier ses doutes. Chaque appel serait potentiellement enregistré, chaque conversation potentiellement utilisée.
Le temps des questions
L’UFICT-CGT revendique le rétablissement des rôles respectifs du Cabinet et de l’administration, l’application de la charte élus/administration, la protection des agents contre les pressions. Elle demande un rendez-vous au Maire en urgence. Cette demande, comme le courrier du lanceur d’alerte, attendrait toujours une réponse.
Le silence devient ainsi le langage d’un certain exercice du pouvoir. Un silence qui dirait : nous n’avons pas de comptes à rendre, nous ne justifierons pas nos méthodes, nous n’expliquerons pas nos pratiques. Un silence qui transformerait une municipalité démocratique en fief opaque où les libertés fondamentales ne seraient plus que des principes abstraits qu’on invoque dans les discours avant de les piétiner dans la pratique.
Dans les communes de la petite couronne, l’automne dépose son manteau de brume sur les façades. C’est la saison où les certitudes vacillent, où les masques tombent, où la lumière rasante révèle ce que l’été avait dissimulé. Et sous cette lumière crue apparaît une vérité incommode que chaque génération doit réapprendre : le pouvoir, quelle que soit sa couleur, possède une tendance naturelle à la surveillance, au contrôle, à l’intrusion.
Le 3 octobre 2024, un citoyen vigilant a envoyé un courrier demandant des éclaircissements. Ce courrier, adressé au cabinet du Maire à l’attention du premier magistrat, est resté sans réponse. Et dans ce silence assourdissant se lit peut-être la plus troublante des non-réponses. Car dans une démocratie, même locale, le silence n’est pas une réponse acceptable. Le refus de transparence n’est pas une option. Et la surveillance généralisée n’est pas une méthode de management.
Vingt-deux cadres seraient partis, emportant avec eux leur expertise et leur désillusion. Chaque départ raconterait la même histoire : celle d’une administration où le soupçon primerait sur l’écoute, l’étiquette politique sur le dialogue, la surveillance présumée sur la confiance partagée. Et pendant ce temps, les services publics se dégraderaient, les citoyens paieraient le prix de cette guerre d’usure menée dans l’ombre.
L’ironie suprême résiderait ici : une municipalité héritière des combats pour la dignité des travailleurs, condamnée le 22 septembre par le tribunal administratif pour atteinte à la neutralité, persisterait dans des pratiques qui interrogent sur le respect des libertés fondamentales. Des élus qui dénonceraient l’autoritarisme mais en recycleraient certaines méthodes.
L’article lui-même n’évoque pas Pascale LABBE, et les syndicats ne mentionnent pas son nom. Parfois, une image dit simplement : voici celle qui, par fonction, devrait veiller sur ce dont nous parlons.
Certains se demanderont pourquoi le visage de Pascale Labbé illustre ces lignes. La réponse tient en quelques titres : déléguée au développement du service public et du personnel communal, aux temps libérés, et Vice-Présidente du Conseil départemental. Ni l’article ni les syndicats ne prononcent son nom. Mais dans le théâtre du pouvoir local, il arrive que les fonctions parlent plus fort que les mots, et que l’absence même devienne une présence.
L’hiver approche. Et avec lui, peut-être, le temps où les citoyens de Noisy-le-Sec décideront qu’ils méritent des réponses. Le temps où ils exigeront que le pouvoir municipal redevienne ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : un service transparent, respectueux, démocratique. Le temps où les questions posées obtiendront enfin des réponses, où le silence cessera d’être le dernier refuge de ceux qui n’ont rien à justifier.
Car dans cette commune en mutation où se côtoient l’histoire ouvrière et les défis contemporains, une leçon émerge avec la clarté de l’hiver qui approche : le véritable service public ne se construit pas sur l’intimidation, mais sur le respect. Pas sur la surveillance présumée, mais sur la confiance partagée. Et certainement pas dans le silence obstiné face aux interrogations légitimes des citoyens et des agents qui font vivre, jour après jour, les services publics locaux.
Cet article s’inscrit dans le cadre de la liberté d’expression garantie par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme et la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.Les faits, citations et témoignages évoqués reposent sur des éléments disponibles, des documents syndicaux publics et des informations d’intérêt général au moment de la publication.Aucune imputation personnelle de nature diffamatoire n’est formulée à l’encontre d’un individu déterminé.
L’article relève d’une démarche d’information et d’analyse sur le fonctionnement institutionnel d’une collectivité publique, sans intention de nuire ni d’atteindre à l’honneur d’une personne.Toute précision ou rectification documentée sera naturellement publiée à la demande des intéressés dans le respect du droit de réponse.