Le budget primitif de Noisy-le-Sec : Derrière les chiffres, une réalité inquiétante !

Qu’un document administratif aussi singulier qu’une « note de service » vienne trois semaines après le vote solennel du budget, et circule (sous le manteau), tenter d’en expliquer les mystérieux équilibres, voilà qui suffirait à éveiller la curiosité du plus placide des contribuables noiséens.
Cette missive ayant pour objet : »Clarifications relatives à l’équilibre budgétaire suite au vote du budget primitif 2025″, émanant des profondeurs bureaucratiques de notre Hôtel de Ville, signée d’un cadre des finances sous l’autorité de Bruno Martinez, mérite que l’on s’y attarde tant elle révèle, malgré elle, les fragilités d’un édifice budgétaire que la majorité municipale s’est empressée de faire adopter et dont le Maire se vante sur les réseaux sociaux.

Commençons par l’évidence : si une « clarification » s’impose après le vote, avec une note de service au ton défensif,  c’est bien que la présentation initiale manquait de cette transparence que nos édiles prétendent pourtant chérir.

Étrange dialectique où la majorité se voit contrainte d’expliquer a posteriori ce qu’elle n’a pas su ou voulu exposer avant les discussiosn du budget lors de la séance du conseil municipal du jeudi 20 mars 2025.

Manque de préparation, budget préparé dans la précipitation ou volonté de masquer les fragilités d’un budget bancal ?

Ce document, dont le ton défensif transpire à chaque ligne, s’apparente davantage à un plaidoyer tardif qu’à un exercice pédagogique.

L’épargne nette : le thermomètre qui fait froid dans le dos

Le document admet, avec une candeur désarmante, que l’épargne nette de la commune (2,15 millions d’euros) ne couvre nullement l’annuité de la dette (5,7 millions d’euros).

Pour justifier cette anomalie financière, soulevée par Jean-Paul Lefebvre avant que le Maire ne lui coupe la parole et lui prive de micro lors du conseil municipal du 20/03/2025, la note invoque le droit en rappelant que cela n’a rien d’illégal ! Puis l’auteur de cette note s’aventure à nous proposer, dans un moment d’égarement un comparatif douteurx :  l’exemple des communes de Bondy et Bagnolet.

Voilà qui est rassurant ! Notre commune, jadis fière de sa gestion, se console désormais en se comparant à des entités dont les difficultés financières sont de notoriété publique.

« Consolez-vous, cher Noiséen, nous ne sommes pas encore en faillite comme le voisin ! » – tel semble être le message subliminal de cette note.

La rhétorique du « c’est légal » rappelle étrangement cette maxime cynique bien connue des juristes : « Summum jus, summa injuria » (l’excès de droit peut engendrer l’injustice suprême). En d’autres termes, se retrancher derrière le strict respect de la loi pour justifier une gestion financière inquiétante, c’est oublier que la légalité n’est qu’un minimum, pas un idéal à atteindre.

Notre municipalité se satisfait d’être dans les clous juridiques tout en négligeant l’esprit de prudence et de responsabilité qui devrait guider toute gestion des deniers publics.

C’est comme si un médecin se vantait que son patient n’est pas mort, sans mentionner qu’il est gravement malade.


la légalité n'est qu'un minimum, pas un idéal à atteindre. la légalité n’est qu’un minimum, pas un idéal à atteindre.

L’autofinancement : prestidigitation comptable

La majorité municipale, à l’instar d’un illusionniste de province, sort de son chapeau un « autofinancement global » de 7,8 millions d’euros, somme qui, comme par enchantement, dépasse le remboursement du capital de la dette.

Ce tour de magie s’opère grâce à l’intégration d' »opérations d’ordre » et de dotations aux amortissements dans le calcul.

Permettez à « l’apprenti juriste » que je suis une analogie : prétendre qu’un tel autofinancement est solide, c’est comme affirmer qu’un château de cartes est une habitation durable. Ces écritures comptables, aussi techniques soient-elles, ne constituent pas des ressources tangibles mais des jeux d’écriture dont la réalité financière s’évapore dès qu’on les confronte aux besoins concrets de notre commune.

L’équilibre budgétaire : la conformité, ce minimum syndical

La note s’enorgueillit que le budget respecte scrupuleusement l’article L1612-4 du Code général des collectivités territoriales. Quelle prouesse ! Respecter la loi serait-il devenu un exploit dans notre république ?

Féliciter une municipalité pour avoir produit un budget légal revient à applaudir un automobiliste qui s’arrête au feu rouge.

Le « petit équilibre » tant vanté par nos édiles se résume à un solde positif de 3,87 millions d’euros, marge de manœuvre si ténue qu’elle s’apparente au fil sur lequel danse un funambule par temps de grand vent.

Que survienne une dépense imprévue, une baisse des dotations de l’État ou un ralentissement des transactions immobilières affectant la taxe d’aménagement, et voilà notre équilibre volatilisé comme neige au soleil.

Les annexes budgétaires : le diable se cache dans les détails

En scrutant les annexes C1.1 à C1.3 évoquées par la note, on découvre que les prétendues « ressources propres » intègrent des provisions (925 000 euros) et une dotation aux amortissements substantielle (2,35 millions d’euros).

Ces mécanismes comptables, aussi légitimes soient-ils en droit budgétaire, ne peuvent masquer une réalité fondamentale : la commune vit en partie sur ses réserves et sur des anticipations dont la matérialisation n’est nullement garantie.

Ces dotations aux amortissements(2,35 millions d’euros) et les provisions (925 000 euros) sont comptabilisées comme des « ressources propres ». Cela donne une image trompeuse de la santé financière de la commune, car ces montants ne représentent pas des liquidités disponibles ou des revenus réels, mais plutôt des ajustements comptables.

En résumé, bien que légitimes sur le plan comptable, ces mécanismes masquent tout simplement  le fait que la commune dépend de ses réserves et de prévisions futures incertaines pour équilibrer son budget ! Il n’y a vraiment pas de quoi faire une vidéo pour se vanter  de ce budget sur les réseaux sociaux  !

« Le droit des finances publiques est à la conjonction du politique et de l’économique » C’est ce que nous rappelait le Doyen Vedel.

Cette vérité académique nous rappelle que derrière l’apparente technicité des chiffres se cache une vision politique que la majorité peine manifestement à assumer pleinement.

Un budget en équilibre précaire

Ce que révèle cette note explicative, c’est moins la solidité du budget primitif 2025 que sa fragilité structurelle.

L’épargne nette insuffisante, la dépendance aux écritures comptables et l’absence de marge significative dessinent le portrait d’une gestion municipale qui navigue à vue, sans boussole stratégique autre que le strict respect du cadre légal.

Dans son « Traité de science financière », Gaston Jèze écrivait que « le budget est l’acte par lequel sont prévues et autorisées les recettes et les dépenses » mais aussi « l’expression financière d’un programme politique ». Si tel est le cas, le programme de notre majorité municipale semble se résumer à éviter le naufrage plutôt qu’à tracer un cap ambitieux pour notre ville.

Qu’il me soit permis, en guise d’épilogue, de formuler cette interrogation à nos édiles : est-ce là l’horizon que méritent les Noiséennes et les Noiséens – une gestion qui se contente du minimum légal, sans ambition pour l’avenir, sans vision pour notre commune ?

Si j’étais élu d’opposition, je serai déjà en train de finaliser une demande de saisine  pour solliciter, en urgence,  auprès du Préfet une analyse approfondie par la Chambre Régionale des Comptes, tant la réalité des chiffres est inquiétante !

Le contribuable jugera.


Ce que l'on retient du budget primitif 2025 de Noisy le Sec